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                     Je me trouvai un jour en Floride dans la voiture d’un couple de Nord-Américains rencontré chez des amis peu de temps auparavant. Nous longions la côte Ouest en direction de Sarasota, lorsqu’Ivan me proposa de visiter le musée Edison, ajoutant qu’il ne s’agissait pas seulement d’un endroit dédié aux découvertes scientifiques d’Edison mais aussi d’une magnifique villa entourée de jardins.  J’acceptai avec plaisir et une heure plus tard le site apparaissait devant nous dans un écrin de plantes luxuriantes.  Seulement il était 17H20 et  un gardien nous informa que le musée fermait à 17H30 et que par conséquent nous ne pourrions pas visiter l’endroit ce jour-là.

    Sharon et moi nous apprêtions à faire demi-tour, lorsque Ivan  fit un pas en avant vers le gardien et lui dit d’une voix neutre que nous allions acheter des billets d’entrée et effectuer la visite immédiatement. Je découvrais alors un nouvel Ivan au visage rougeaud et à la mâchoire crispée, tandis que Sharon se dirigeait vers la voiture d’un pas nonchalant, probablement habituée à le voir se comporter ainsi.

    Les deux hommes parlementèrent âprement pendant une ou deux minutes, puis Ivan vint triomphalement nous chercher pour effectuer la visite! 

    Il nous restait donc huit ou neuf minutes qui nous permirent de nous ruer vers le laboratoire et les pièces à vivre de la villa d’Edison. Ivan, le visage réjoui, commenta notre visite express comme si de rien n’était. Je me sentais à la fois gênée et au bord du fou-rire, mais évitai le regard sombre du gardien lorsque nous sortîmes de la villa à 17H30 précises!

    Je ne sus jamais si l'employé avait été menacé ou soudoyé, et le voyage en voiture se poursuivit accompagné du joyeux babillage d’Ivan et du silence indifférent de Sharon.

    Je ne remerciai évidemment pas Ivan puisque la visite avait clairement servi de prétexte à ce vieux petit garçon obstiné et coléreux, pour nous faire profiter d’une pathétique séance d’affirmation de soi …

    D’ailleurs je n’ai jamais revu Ivan et Sharon.



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     Copie de IMG 0264Nous avons tous en mémoire les  images d’endroits que nous avons bien  connus mais que nous n’avons pas eu  l’occasion de visiter depuis longtemps.  Ces images sont très précises et pourtant…


    Copie de IMG 0263

    Ainsi un matin, il y a quelque temps, je me retrouvai au volant de ma voiture afin d’accompagner mon fils passer un concours dans l’université d’une grande ville de notre région.

    Avant de partir je me suis dit (et je lui ai dit) : « Pas de problème, j’ai suffisamment traîné dans cette fac, nous ne risquons pas de nous y perdre ». Seulement voilà, c’était il y a ….années (je n’en dirai pas plus, ça risque de vous miner autant que moi).

    Ce matin-là, nous partons de bonne heure, et le GPS nous amène au bord de la zone piétonne du campus ; je gare la voiture et nous nous avançons. « Alors Mam, on va où ? » « Eh bien … à droite ». Je tente désespérément de me repérer au milieu de tous ces bâtiments nouveaux pour moi et de ces pelouses traversées par les rails du tramway… Après quelques regards circulaires et désespérément contre-productifs, je me décide à avouer : « En fait, je ne reconnais presque rien, je ne sais plus me repérer ici ! »

    Un curieux maelström s’est infiltré dans mon esprit. Je reconnais ce hall et ces amphis, ensuite je me retourne et tout est différent… cette rampe inclinée utilisée par les étudiants handicapés n’a pas changé, mais là à droite se trouvait une cafétéria qui a manifestement été remplacée par une médiathèque… Les cours de tennis ont disparu ou bien ont été déplacés…

    Des panneaux d’information nous aident heureusement à trouver la salle dans laquelle auront lieu les épreuves du concours. " Bonne chance, à ce soir !" 

     

    senta.jpgLivrée à moi-même sur le campus vide, je chemine lentement sur les pas de la jeune étudiante de jadis…L’émotion a fait place à un certain calme intérieur. Tout autour de moi, mêlés au bruissement des feuilles, j’entends les voix feutrées et les rires d’avant…Pierre le libertaire qui aimait tant Leo Ferré, Anouk, Sacha…et ma propre voix d’alors, déjà voilée, accompagnée de mon inséparable guitare…Copie-de-groupe.jpg

    Ma mémoire et mes sens aiguisés à l’extrême se rejoignent dans un tourbillon temporel, s’enlacent, virevoltent, créant ainsi de concert une œuvre qui s’intitulera: « nouveaux souvenirs ».

    Ainsi va la mémoire…

     



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    rose-blanche.jpg                                                                                                                        (photo internet)

     

                    Ce texte court a participé à un jeu d’écriture organisé par " La petite fabrique                                               d'écriture" en mai 2013.


    Dans la roseraie

     

    Des promeneurs s’avancent à pas feutrés sur le sol moelleux de l’allée,

    Le soleil joue à cache cache à travers les branchages…

    Leurs sens savourent d’abord le pépiement des oiseaux, puis une fragrance douce, sucrée, entêtante…, un parfum de paradis…

    Au bout de l’allée surgit de la pénombre un carrousel de couleurs, corail, jaune de Naples, rouge carmin et pourpre qui se mêlent aux éclats du soleil,

    Orgueilleuses et sûres d’elles, les roses se pavanent sur leurs tiges délicates,

    Les visiteurs s’exclament, émerveillés devant ce jaillissement de teintes éblouissantes,

    Pendant ce temps, tout au fond du jardin, seule et ignorée, une rose blanche se met à pleurer…

     



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  • REMINISCENCE...

                                                                               Marc Chagall (le cirque)

     

    C’était à cet endroit précis, il y a quarante ans. On y avait monté un chapiteau sous lequel les spectateurs étaient assis autour de la piste, sur des chaises pliantes.

    Je me suis retournée et Nicolas a incliné sa tête très légèrement vers la droite, fugacement, dans un mouvement d’une extrême vivacité bien que d’une très faible amplitude. Nos regards se sont croisés, le sien m’a brûlée et j’ai tourné la tête immédiatement, d’une façon désordonnée, presque paniquée. Et j’ai continué à sentir ce regard sur ma nuque, sur mes cheveux, jusqu’à la fin de la représentation.

    Quel spectacle pouvaient donc offrir ce soir-là ces artistes de cirque itinérants ?

    Je ne m’en souviens plus. Ce souvenir s’est enfui au profit du regard brûlant échangé avec Nicolas.

    Je marche sur l’asphalte, je marche sur nos traces, Nicolas était vivant et maintenant seul le petit garçon vit encore en moi. L’ombre des platanes, je marche sur nos pas, la cloche de l’église, le temps n’existe pas.

    Le bonheur d’être amoureux, le bonheur de l’attente amoureuse, une vie remplie grâce à un geste, un sourire. Avant tu n’étais pas là, puis un jour tu fus là, et puis…je ne sais plus.

    J’ai déménagé avec ma famille, comment ai-je pu cesser ainsi de me préoccuper de toi ? Je ne comprends pas, je ne me comprends pas.

    Me tenir ici me fait mal, me fait du mal.

    Comment t’étais-tu rendu au cirque ce soir-là Nicolas ? A pied, toi qui habitais un hameau éloigné ? Je n’arrive pas à t’imaginer entouré d’une famille. Peut-être t’avait-on laissé là en pension, précieux cadeau encombrant des parents trop occupés? Je ne m’étais jamais posé la question. J’ai seulement le souvenir que tu vivais dans ce hameau, peut-être dans une de ces magnifiques maisons du 17ème siècle, protégées de la rue par de monumentales portes Navarraises en bois, tiens pourquoi pas dans celle qui figure sur nombre de cartes postales vantant l’architecture de la région ?

    Je me souviens de toi à l’occasion de saynètes, tu apparais donc toujours dans ma mémoire isolé et sans ces contraintes triviales liées à la vie quotidienne.

    Je continue à marcher de long en large sur l’asphalte dans un périmètre de quelques mètres, et deux ou trois personnes commencent à m’observer depuis la place un peu plus loin.

    A bientôt Nicolas, je vais aller boire un petit café sur une terrasse, et rassurer les autochtones sur ma santé mentale. Tu sais, vivre avec les morts nécessite une certaine habileté à feindre, à dissimuler…

                Le café est délicieux et je peux à nouveau respirer librement, l’étau autour de mon cœur s’est desserré...

     

     

     


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  • rideau-copie-1.jpg                                                             (Photo internet)

     

     

    Ce texte court a participé à un jeu d’écriture organisé par la communauté LA PETITE FABRIQUE D’ECRITURE en janvier 2012.

     

       

    Derrière le rideau…

     

    J’aimerais tant être avec vous tous,

    Rire et parler avec vous…

    Je vous aperçois à travers un rideau d’obstacles,

    De difficultés à communiquer,

    A faire partie (même temporairement) d’un groupe…

    Alors je vous observe depuis ma bulle,

    Lové dans la douceur des choses que j’aime et dont je ne crains rien,

    Le soleil déclinant, le gris bleuté d’un ciel de printemps…

    Parfois je m’interroge : suis-je un être humain à part entière,

    Ou bien fais-je partie d’une autre espèce,

    Une espèce qui n’a pas réussi à s’adapter à son environnement

    Et dont les membres errent sur cette planète tels des électrons fous ?...

     

     

     


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